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10/08/2010 - Cyrano, une grande imposture, et alors ?

Article d'Adrien Vergnolle avec Arnaud Bernard dans Sud-Ouest

Figure tutélaire de la commune et attraction touristique, le personnage de Cyrano n'a pourtant rien à voir avec Bergerac, contrairement à l'idée encore répandue.


La statue de Cyrano, place Pélissière, lieu de pèlerinage photographique. © ARCHIVES Emilie Drouijaud

La statue de Cyrano, place Pélissière, lieu de pèlerinage photographique. © ARCHIVES Emilie Drouijaud

Mais qu'est-ce que les touristes trouvent à la statue de Cyrano ? Place Pélissière, les flashs crépitent de jour comme de nuit devant le géant coloré qui semble posé sur une grosse boîte de conserve, provoquant chez les indigènes un ironique haussement d'épaules ou, c'est selon, une bouffée d'orgueil chauvin. Cyrano, c'est un peu la tour Eiffel locale, à la fois le décor des portraits de vacances et le phare de ses dévots venus en pèlerinage. Pourtant, devant la statue, le plus souvent, la foule sèche quand il s'agit de dire qui était vraiment l'icône au nez mastoc. Ils n'en sauront pas plus, à vrai dire : à Bergerac, Cyrano se résume à une litanie de jeux de mots sur la devanture des boutiques et deux statues dans la vieille ville.

Déception numéro 1. Suivie par le coup de grâce, généralement donné par les guides de l'Office de tourisme : non, Cyrano n'est pas de Bergerac. Pas même est-il gascon, ni lui, ni son auteur et encore moins son inspirateur, le « vrai » Hercule Savinien de Cyrano, dit Cyrano de Bergerac. Parisien, cadet au régiment des gardes, poète et libre penseur contemporain de Molière, il s'est adjoint le patronyme « Bergerac » parce que c'était le nom d'une terre familiale dans la vallée de Chevreuse, à Saint-Forget, dans la grande région parisienne. Sur les berges de l'Yvette, qui ressemble assez peu à la Dordogne.

Mythologie
Bergerac n'est même pas le décor de la pièce. L'auteur, Edmond Rostand, y a sa rue, mais il n'est pas né ici (mais à Marseille), n'est pas mort ici (à Paris) et il n'y a même pas donné sa pièce. Il a vécu à Cambo, au Pays basque, où un musée lui est dédié. Cyrano à Bergerac, une supercherie ? On est rabat-joie : « Cet aspect d'imposture existe ailleurs », explique Thomas Sertillanges, exjournaliste et spécialiste de Cyrano. « Le château d'If draine des touristes qui viennent voir la cellule du Comte de Montecristo, et un guide montre le tunnel par lequel il s'est échappé. C'est un personnage de roman et personne n'est dupe. Mais ce n'est pas travestir la vérité : ce sont des personnages qui sont entrés dans notre mythologie… »

Peu importe la vérité crue, pourvu qu'un lieu donne une âme aux héros de papier. Les fans de Tintin ne manquent pas le château de Cheverny (Loire), le modèle de Moulinsart. Et le D'Artagnan célébré par son Gers natal a plus à voir avec le héros d'Alexandre Dumas que son modèle réel, simple mousquetaire. Les amoureux de Cyrano, eux, vont à Bergerac.

Ami du Bergeracois Pozzi
On imagine ces passionnés encore plus déçus que les autres. Mais on a tort, car en fait, le doute est permis. Ne lit-on pas, acte IV, scène 3, le Cyrano de Rostand joliment déclamer : « Écoutez… C'est le val, la lande, la forêt / Le petit pâtre brun sous son rouge béret / C'est la verte douceur des soirs sur la Dordogne… » Pas étrangère au faux Gascon, donc. On dit aussi qu'Edmond Rostand était ami avec Samuel Pozzi, Bergeracois illustre et père de la gynécologie moderne, et qui aurait été ravi du succès de la pièce qui porte le nom de sa ville, puisqu'en 1897, l'année de la première représentation, il était en campagne pour les sénatoriales. Et « quand Savinien de Cyrano choisit le nom de Bergerac, c'est un hommage à la ville, à la Gascogne, ça lui plaît », ajoute Thomas Sertillanges. Verdict : Cyrano est un « patrimoine immatériel » de Bergerac, qui pourrait s'en soucier plus. Un « formidable cadeau » d'Edmond Rostand, comme dit l'adjoint au patrimoine Fabien Ruet, partisan d'un musée Cyrano et pour lequel une étude a été lancée en mai dernier. Il y a dix ans, Thomas Sertillanges a créé les Amis du musée Cyrano (1), pour promouvoir ce projet qui n'a bizarrement jamais trop effleuré les élus. Pas le même panache que Cyrano : « Mais on ne se bat pas dans l'espoir du succès ! Non, non c'est bien plus beau lorsque c'est inutile ! »


© Sud-Ouest, Adrien Vergnolle avec Arnaud Bernard 





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Publié le 10 / 08 / 2010.


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