Le collectionneur
« Bien sûr, vous n’êtes pas, je sais, collectionneur
Moi monsieur je le suis, cela fait mon bonheur
Oh ! je ne garde pas des collections de cannes
Ou de timbres ou d’affiches, ou de vieilles icônes
je n’ai pas plus de goût pour les soldats de plomb
je ne récolte pas tous les tire bouchons
ou tous les portes-clés, non ! moi ce que j’adore,
C’est faire collection de belles métaphores.
Vous voyez ce point rouge ! Eh bien, je l’ai trouvé
Presque sans le vouloir sur l’ « i » d’un verbe aimer ».
Un pauvre verbe aimer que l’air du temps efface.
Le point rouge est resté pour indiquer la place
Par ou coula le sang de la séparation
Quand l’amour à jamais perdit son illusion.
Venez, continuons s’il vous plait la visite
Vous serez j’en suis sûr étonné de la suite
Car tenez, voyez-vous ce gant, je n’en ai qu’un
Je l’ai trouvé « dans la figure de quelqu’un »
Il servit autrefois à laver la conscience
D’une âme enrubannée de panache et de science.
Hé ! regardez là-bas : ces quatre vérités
Qui marchent fièrement au devant des dangers.
Est-ce qu’elle n’est pas jolie la métaphore
Qui dit que pour marcher fièrement il s’honore
De faire en avançant, parmi les fanfarons
« Sonner les vérités comme des éperons ».
Dans cette boite là, qui n’est pas de Pandore
Vous allez découvrir, mieux qu’une métaphore
C’est pour moi le bijou de loin le plus précieux
Il nous vient de l’éther, il est tombé des cieux
Il s’agit de la dent perdue par la grande ourse
Qui mordit Cyrano lors de la folle course
Que sous la jolie plume acerbe de Rostand
Il entreprit un jour métaphoriquement.
© Jean-Claude Martin
Jean-Claude Martin, comédien et metteur en scène, est aussi l'auteur de livres de référence sur la communication. Voir les liens.