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Sur scènes et sur écrans

1997 - Francis Huster

Paris

C'est dans le costume de Cyrano que Francis Huster est entré au musée Grévin. Avant lui, c'est Coquelin qui avait eu droit à sa statue de cire. Francis Huster avait alors choisi d'être au côté de Christina Realli en Roxane ? ce qui est sympathique pour cette jolie comédienne (qui est, ou fut, sa compagne, mais cela ne nous regarde pas...) et, curieusement, de tenir le nez postiche dans sa main. Plutôt que de prendre le risque d'être défiguré pour toujours dans son immobilité de cire ? L'explication psychanalytique se trouve peut-être au sein des pages du livre qu'il a écrit au moment d'être l'un des comédiens du centenaire, A la recherche du nez perdu.


A la recherche du nez perdu.

Si, pour une fois, on s'occupait de montrer le Bergerac secret et pas seulement le Cyrano-mythe ? Jouer Cyrano est le défi suicidaire dans toute vie d'acteur. Tout le monde l'attend là et, calvaire, imagine déjà ce que le comédien fera du monument, matamore franchouillard et gouailleur, endiablé, nez en patate, costume rouge flamboyant, grands moulinets et coups de chapeau. Pour éviter cette coquelinade, ce Cyrano-m'as-tu-vu, comment faire ? Réfléchir sur le texte pour infléchir le rôle. Et que nous dit ce teste ? Commençons par noter ce qu'il ne dit pas. « Cyrano ? C'est le frère de Carmen ! » La boutade d'André Malraux est parfaitement révélatrice. Et les comédiens sont particulièrement valorisés en jouant les amoureux. Mais y ajouter la laideur les excite davantage encore. Et les singularise d'une plus brillante façon. Cyrano se tait, j'existe ; Cyrano parle : je joue. Voilà ce que se dit l'acteur. Si seulement, dans ses silences, il arrivait à révéler Bergerac et à imposer Cyrano lorsqu'il parle, quelle réussite cela serait ! Le rôle est l'abîme de références; Ne s'accrocher à aucune, tomber dans le vide immédiatement et entreprendre la remontée pierre par pierre, vers par vers, regard par regard, voilà le noble but ! Coquelin est mort, vive Coquelin ! Cyrano est mort, vive Bergerac !



Francis Huster, © éditions Ramsay Archimbaud 1997





Il est des oeuvres dont on ne se lasse pas.

Jean Vilar rêvait de monter Cyrano à Chaillot, il en fut empêché par la Comédie Française qui, en ce temps-là possédait les droits de la pièce. Elle est aujourd'hui dans le domaine public et chacun peut la représenter en toute liberté. Pièce incroyable que Cyrano : chacun, quelle que soit sa famille politique ou sociale la revendique pour soi. La droite, parce qu' elle est cocardière, la gauche parce que Cyrano y défend les pauvres et les déshérités, les anarchistes parce que Cyrano en est un : ni dieu, ni maître, « ne pas monter bien haut peut-être mais tout seul ! », les biens pensants parce qu'elle est chaste : « J'ignorais la douceur féminine, Grâce à vous une robe a passé dans ma vie », les romantiques parce qu'on y pleure, les sarcastiques parce qu'on y pourfend l'hypocrisie.



En fait la pièce est tout ça à la fois, et ce n'est pas un hasard si Cyrano est le personnage le plus populaire qui soit, aussi bien chez les hommes mais aussi et c'est plus surprenant, chez les femmes. Curieusement aussi aucune thèse n'a jamais été écrite sur Cyrano. C'est que le personnage est incroyablement multiple et l'intrigue beaucoup plus compliquée qu'il n'y paraît.



On pourrait dire, en délirant, que Cyrano est homosexuel et que c'est de Christian, en fait, qu'il est amoureux. N'est-il pas prêt à tous les sacrifices pour lui ? N'a-t-il pas peur de l'amour de Roxane ? On pourrait dire qu'il est freudien et que Christian n'est que son double. Sans parler de son fameux nez, qui n'est en somme qu'un prétexte, car aucun appendice nasal aussi monstrueux soit-il ne sera jamais un frein réel pour un homme vraiment amoureux ; de grands lovers de WC Fields à Michel Simon, avaient de gros nez sans que ceci ne les gène en rien dans leurs conquêtes. J'ai mis en scène Cyrano pour la première fois il y a quinze ans. C'était avec Jacques Weber au Théâtre Mogador, avec le succès que l'on sait. Il n'est pas dans mes habitudes de reprendre mes vieilles mises en scène.La vie est trop courte et il y a tant de pièces à monter. Mais il est des oeuvres dont on ne se lasse pas. Cyrano en est une qu'on a sans cesse envie de revisiter."Comédie héroïque", Cyrano est aussi un grand spectacle populaire dont j'ai gardé les grands moments dans ma nouvelle mise en scène.Les batailles : burlesque chez Ragueneau, dramatique au siège d'Arras. J'ai gardé le cheval qui galope pour l'arrivée de Roxane « Rangez-vous, vile tourbe, pour qu'il puisse décrire avec pompe sa courbe ».



Les grincheux me reprocheront ces grands effets de mise en scène mais les enfants ne m'auraient pas pardonnés que je les en prive. Par contre, cette fois-ci, le décor sera plus dépouillé. Un vaste plan incliné qui mène à la lune, un arbre qui surgit de l'ombre, un minimum d'accessoires, juste ce qu'il faut pour raconter l'histoire. Une alternance aussi, dans ce nouveau spectacle, de grandes scènes de foules avec des moments de solitude, avec deux ou trois personnages isolés sur 'immense plateau. Car Cyrano est aussi une pièce intimiste.

Et ces moments-là sont trop souvent noyés dans la foule.Une joyeuse troupe de copains enfin. Ils sont plus de quarante et ça fait du bien en ce temps de chômage et de crise; ils mènent le spectacle tambour battant. Pour faire revivre cette pièce que certains méprisent parce qu'elle leur semble trop "roman-photo", mais que j'aime moi, profondément, parce que derrière cette flamboyante façade, se cachent des moments de pure poésie, de mélancolie profonde, et parce qu'on y raconte formidablement bien l'amour et la solitude.



Jérôme Savary, notes de mise en scène parues dans le programme du spectacl.





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Publié le 13 / 04 / 2005.


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